Je trouve que nous ne sommes pas en phase avec ce que nous devrions être.
J'ai tendance à être négative. Je suis attristée, en fait, par plein de choses. Je sens que nous ne sommes pas en phase avec ce que nous devrions être.
REGARDS 2
2/23/20255 min read


Les gens croient que tout cela est isolé des grands problèmes qui nous concernent, mais ce n’est pas vrai. Si les hommes traitent mal les femmes, c'est qu'il y a un problème. Si des gens se permettent rire de quelqu'un qui est en difficulté, c'est qu'il y a un problème. L’autre jour, je me suis retrouvée dans un garage auto. J'avais aperçu au loin dans le parking ce qu'on dit être fou. Donc, un homme qui vit dans la rue. Il arrive donc près des gens qui étaient là. Il fouillait dans la poubelle tout en marmonnant. Et les gars qui étaient là se sont mis à rire. Ce n’était pas des gamins. Ça me dérange. Je me demande s'ils s'observent autour d'eux ? Est-ce qu'ils ont vu que la santé mentale est en train de gagner du terrain dans notre pays ? Alors qu’on le voit de plus en plus dans une ville comme Pointe-à-Pitre, par exemple. Et le fait qu'ils en rient, ça m'a choquée. C'est comme si tu ne te rends pas compte que c'est près de toi, que c'est à la porte de tout un chacun. Et que ça peut arriver à n'importe qui. D'avoir un choc et de se retrouver ainsi ; d'être dans la drogue, l'alcool et de se retrouver comme ça. D’ailleurs, je vois qu'en termes de problèmes de santé mentale, on gagne du terrain.
Tout cela, c’est parce que nous ne sommes pas ancrés dans une dynamique qui est la nôtre. Qui nous ressemble, qui nous renverrait à nous et qu'on pourra difficilement mettre en place dans le système dans lequel on est aujourd'hui. En tant que Français, avec un fantasme de l'ailleurs, ce n'est pas vraiment accessible pour tous et avec des frustrations.
Avons nous, selon toi, la capacité de changer les choses ?
On a la capacité parce qu'on a des talents et des gens qui ont la capacité de faire des choses. Mais si on ne donne pas l'espace, la place, le lieu, pour que ça fasse une proportion nationale ou internationale.
Pour cela, il faudrait qu’on s’aime. Est-ce qu'on s'aime ? Je ne parle pas d'aimer l'autre, s'aimer soi. C'est quand tu t'aimes toi que tu peux aussi arriver à être dans une compassion avec l'autre, un respect de l'autre et pas seulement dans des rapports finalement de consommateur et vendeur parce que moi, c'est surtout de ce que je vois. Et est-ce qu'on est suffisamment aimants pour soutenir celui qui fait ?
C'est pour cela que je te parle de trucs individuels aussi à travailler et qu'il y a un travail individuel à faire sur soi, la mentalité, etc. Il y a un travail à faire sur la mentalité. Je pense qu'il y a certaines choses qui ne nous aident pas, qui nous ralentissent. Mais arriver à sortir de ces espèces de mentalités-là. Ce n’est pas simple. C'est aussi pour apprécier les ventes. C'est le monde dans lequel on est maintenant. Et ça, ce n’est pas propre à Guadeloupe, malheureusement. Probablement, mais on le voit plus.
Que penses-tu de la société dans laquelle nous vivons aujourd'hui ?
C'est une question qui va chercher à chercher des choses en moi, très loin, parce que je me questionne souvent. J'ai tendance à être négative. Je suis attristée, en fait, par plein de choses. Je sens que nous ne sommes pas en phase avec ce que nous devrions être.
On peut se sentir mal dans une société comme ça, où tu vois un potentiel que tu n'arrives pas vraiment à embrasser. Entre autres choses, nous n’avons pas une politique culturelle qui fait émerger les talents, par exemple. C'est aussi le pays qui met des choses en place, qui permet que les talents soient là. Donc ça veut dire que peut-être si on avait été un pays, on aurait pensé à ça, mais on n'est pas un pays, on est un département. Tout cela me donne l'impression qu'on n'est pas en phase avec ce qui se passe autour de nous. Je trouve que nous tournons en rond ou nous faisons un pas en avant, deux pas en arrière. Je suis désolée, mais s'il n'y a pas la mer et la forêt, le sport, je ne sais pas comment je ferais.
Ce qu'on devrait être, je ne sais pas, mais je sens que si la culture n'est pas au centre, c'est qu'il y a un problème. Par culture, j’entends l'éducation, la sensibilisation publique, la création, la recherche et la valorisation des artistes ou d’autres aspects. Mais c'est tout un environnement, tout un écosystème qu'il faut mettre en place. Et s'il ne se met pas en place, qu'est-ce qu'on fait ? Parce que c'est la question maintenant qu'on a envie de poser. Si les politiques qui sont censés le faire ne le font pas, en tout cas, est-ce qu'on reste assis là à leur reprocher de ne pas le faire ? Est-ce qu'on reste assis là en colère parce qu'ils ne le font pas ? Alors, il y en a qui vont réussir à faire des choses, mais il y en a qui n'ont pas cette force-là.
Il faut aussi dire qu'il y a un travail à faire individuellement. Et c'est aussi changer la façon de penser. C'est une question d'éducation. Mais là, il faut éduquer les adultes aussi. Oui, d'accord. Moi, je veux dire, je n'ai pas été forcément éduquée comme là, là, juste aujourd'hui. J'ai pris conscience qu'il y a certaines choses, que si, que ça, qu'il ne fallait pas que je pense comme ci, qu'il ne fallait pas que je pense comme ça, ou que j'ai éduqué telle pensée négative qui reste là, alors qu'elle ne me fait pas du bien, et qu'elle ne m'apporte rien, et que je reste dedans, je fais en sorte de... Tu vois, c'est ça. Mais on est bien d'accord qu'on éduque les adultes en particulier.
Pour conclure, en vrai, j'aimerais arrêter de ressasser ces idées-là, mais ce pas simple, ce contexte n'est simple pour personne. Il y en a qui font comme si. Les gens n’osent pas toujours dire ce qu’ils pensent de notre société de peur d’être négatifs. Moi, je n’ai pas peur de le dire, et je vais continuer parce que je suis certaine qu’il y a vraiment quelque chose qu'il faut permettre aux gens de le dire. Il faut le dire. Il faut l'écrire. Il faut le verbaliser. Il y a trop de gens qui ont des idées. Il y a trop de gens qui se replient. Il y a trop de gens qui font les choses eux-mêmes, avec leurs moyens.
Oui, parce que si politiquement, il n'y a pas un vrai projet, un vrai truc qui nous rassemble et nous donne un regard sur demain, on n’avance pas. Et ça je ne le vois pas, et en fait, tu es obligé de faire des choses, de créer. Si tu ne le fais pas, tu perds la tête ! Et peu importe quoi, même si finalement, quelqu’un laisse tomber l'art et se met à faire des sik a koko (1), au moins, tu fais quelque chose !




(1) Confiserie à base de noix de coco
